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La loi française sur « le devoir de vigilance » fait peu à peu des émules

Quelques pays européens travaillent sur des dispositifs responsabilisant les multinationales en cas de violations des droits humains.

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Publié le 23 mai 2019 à 12h00

Temps de Lecture 3 min.

« Emplois décents et lien social ». L’effondrement du Rana Plaza, un immeuble de plusieurs étages qui abritait des dizaines d’ateliers de confection, le 24 avril 2013 au Bangladesh, a fait plus de 1 100 morts et provoqué une prise de conscience brutale : pour alimenter la frénésie des consommateurs occidentaux, friands de tee-shirts, pantalons ou robes d’été pas chers et vite démodés, des millions de personnes travaillent, au bout de la chaîne de sous-traitance, dans des conditions indignes, sont mal payées, mal protégées, mal considérées.

L’industrie de l’habillement, si dramatiquement mise en lumière, n’est pas seule à fonctionner sur ce modèle : la téléphonie, l’informatique ou l’automobile, qui font travailler des myriades de fournisseurs, l’agroalimentaire, qui achète des matières premières partout dans le monde, l’industrie lourde, le BTP, qui emploie des sous-traitants sur les chantiers.

Le drame du Rana Plaza a eu pour effet de conduire un collectif d’ONG françaises (CCFD-Terre solidaire, Les Amis de la Terre, Amnesty International, entre autres) et de syndicats à réclamer aux multinationales de mieux contrôler leurs chaînes de sous-traitance. De cette mobilisation est née en France, en mars 2017, une loi unique au monde : la loi sur le devoir de vigilance. Elle stipule que « sociétés mères et entreprises donneuses d’ordre » d’une certaine taille doivent veiller aux bonnes pratiques sociales et environnementales de leurs filiales et sous-traitants. A cette obligation de prévention et de reporting s’ajoute la possibilité d’engager la responsabilité civile de la multinationale pour l’impact environnemental et humain de ses activités. Problème : outre qu’elle est encore incomplètement appliquée par les entreprises françaises, selon le premier point d’étape réalisé par les ONG au printemps, deux ans après le vote de la loi, elle n’a pas encore réellement fait d’émules en Europe et dans le monde. « Or, sans cadre international contraignant, qui permette d’engager la responsabilité d’une multinationale lorsque son activité se traduit par des violations graves des droits humains, il est illusoire d’envisager que l’industrie du textile ne soit plus fondée sur l’exploitation de femmes et d’hommes dans des pays aux législations moins-disantes », souligne, entre autres, le Collectif Ethique sur l’étiquette.

La France, précurseuse sur le sujet

Cyril Cosme, directeur de l’Organisation internationale du travail (OIT) en France, se veut néanmoins optimiste : « Certes, la France a été précurseuse sur le sujet, car il existe dans le pays une importante tradition législative. Mais d’autres pays vont actuellement dans la même direction. A terme, le débat resurgira sans aucun doute au Parlement européen. » De fait, en 2016, le Royaume-Uni a adopté la clause sur la transparence dans la chaîne d’approvisionnement de la loi « contre l’esclavage moderne » (« Modern Slavery Act »). Cette disposition oblige les sociétés domiciliées – ou qui font des affaires – au Royaume-Uni à rendre compte des mesures qu’elles prennent pour prévenir l’esclavage ou les trafics liés aux droits humains dans leurs chaînes d’approvisionnement. En février 2017, le Parlement néerlandais a adopté le projet de loi sur « la diligence raisonnable en matière de travail des enfants », qui s’appliquera à compter du 1er janvier 2020.

Projet de traité des Nations unies

Quant à l’Allemagne, les partenaires sociaux travaillent sur un projet de loi comparable à la loi sur le devoir de vigilance, présenté en février dernier par le ministère du développement. Un projet de traité à l’échelle des Nations unies est en négociations depuis 2014. Un avant-projet a été présenté en octobre 2018, à Genève, et pourrait aboutir à la signature d’un texte définitif fin 2019, au mieux.

En attendant l’issue de ces négociations, l’OIT mène différentes actions, sur le terrain, notamment au Bangladesh, l’un des principaux pays d’approvisionnement des multinationales du textile. Quelque 3 000 entreprises habilitées à exporter leur production ont été contrôlées par des instances indépendantes et se sont mises en conformité si besoin. « Il y a eu un certain nombre de fermetures d’usines, mais pas tant que ça », note Cyril Cosme. Autre mesure : la mutualisation des audits sociaux effectués dans les usines, permettant aux donneurs d’ordre, multinationales ou pas, de choisir leurs fournisseurs ou sous-traitants en toute connaissance de cause.

Ce dossier est réalisé dans le cadre d’un partenariat avec l’AFD.

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